Un mur privé peut-il être un ouvrage public ?

L’arrêt du Conseil d’État du 3 juillet 2025 (n°494622) précise qu’un ouvrage n’appartenant pas à une personne publique peut, dans certaines conditions, être qualifié d’« ouvrage public ». Ce point intéresse directement les propriétaires riverains et les communes confrontées aux situations de péril et d’exécution d’office en urbanisme et voirie (Montpellier, Hérault, Gard, Aude). Pour un panorama local, voir Urbanisme Montpellier et, côté collectivités, Collectivités & police du maire.

Référence : Conseil d’État, 2e-7e ch. réunies, 3 juill. 2025, n°494622.

Les faits

Des propriétaires détiennent des parcelles situées en contrebas d’une voie communale, séparées par un mur édifié au début du XXe siècle. À la suite de l’effondrement d’une partie du mur et de l’affaissement de la voie, le maire met en demeure de réaliser des travaux (arrêté de péril du 23 juin 2016, relance le 7 avril 2017). Le 27 septembre 2019, la commune demande l’accès au fonds pour exécuter d’office les travaux à leurs frais et émet plusieurs titres de recettes. Le TA annule la décision et les titres ; la CAA annule le jugement et rejette les demandes des propriétaires.

Source : CE, 3 juill. 2025, n°494622

La question juridique

Un mur appartenant à des particuliers peut-il, en raison de son lien avec la voie communale, être regardé comme un « ouvrage public » ?

La solution du Conseil d’État

Oui, la seule circonstance que l’ouvrage n’appartienne pas à une personne publique ne fait pas obstacle à sa qualification d’ouvrage public s’il présente avec un ouvrage public un lien physique ou fonctionnel tel qu’il doit être regardé comme un accessoire indispensable. La CAA, qui a écarté cette qualification au seul motif de la propriété privée du mur, a commis une erreur de droit. L’arrêt est annulé. Une somme de 3 000 € est mise à la charge de la commune au titre de l’article L. 761-1 CJA.

Portée de la décision

Le Conseil d’État rappelle un critère décisif : la qualification d’ouvrage public peut être retenue pour un ouvrage privé dès lors qu’il constitue l’accessoire indispensable d’une voie ou d’un autre ouvrage public. L’élément déterminant n’est pas la propriété, mais le lien physique ou fonctionnel établissant l’indispensable connexité avec l’ouvrage public.

⚠️ À vérifier selon les cas : textes mobilisables (CCH, CJA) et déroulé procédural local.

Impact pratique

Pour les particuliers

  • Qualifier le lien avec la voie (critère d’« accessoire indispensable ») et conserver les preuves des mises en demeure.
  • Relire l’arrêté de péril, la décision d’accès/exécution d’office, les titres de recettes, et leurs dates.
  • Ne pas raisonner uniquement par la propriété privée du mur.

Pour les démarches rapides (gracieux, référé), voir Consultation flash.

Pour les collectivités

  • Motiver la qualification d’accessoire indispensable (lien nécessaire avec la voie ou l’ouvrage public) avant toute exécution d’office.
  • Sécuriser la chaîne des décisions (péril → accès → exécution d’office → titres) et la preuve de l’inexécution.
  • Éviter de fonder la décision sur la seule absence de propriété publique.

Pour un accompagnement opérationnel, voir Collectivités & police du maire.

Checklist express

  • Ouvrage privé en cause : mur lié à une voie communale ?
  • Lien avec l’ouvrage public : physique et/ou fonctionnel établi ?
  • Critère clé : le mur est-il l’accessoire indispensable de la voie ?
  • Actes en présence : péril, mises en demeure, accès, exécution d’office, titres (dates/contenus).
  • Besoin d’un bilan rapide : Consultation flash.

Agir avec un avocat publiciste

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