Un emplacement réservé au PLU (art. L.151-41 du code de l’urbanisme) peut bloquer un permis d’aménager ou un permis de construire. Dans une affaire récente, le Conseil d’État rappelle une règle simple : l’autorité doit refuser toute demande dont l’objet n’est pas conforme à la destination de l’emplacement réservé, sauf cas particulier d’un projet qui réalise l’opération réservée et ajoute un autre aménagement compatible. Ce point est stratégique pour les dossiers à Montpellier, dans l’Hérault et le Gard.
Faits
Permis d’aménager délivré le 12 décembre 2022 pour un lotissement de 15 lots à Moiré (Rhône). Le document graphique du PLU mentionnait un emplacement réservé n°3 pour créer une place publique, empiétant au sud-est du terrain. Le permis prévoyait dans ce périmètre un bassin de rétention des eaux pluviales. Le tribunal administratif a jugé l’ouvrage compatible et a rejeté le recours (5 juillet 2024).
Question
Un permis qui prévoit un aménagement dans un emplacement réservé peut-il être légalement délivré si cet aménagement n’est pas l’opération pour laquelle l’emplacement a été réservé ?
Solution retenue par le Conseil d’État
Règle : refus si l’objet n’est pas conforme à la destination de l’emplacement réservé
L’article L.151-41 permet de délimiter des emplacements réservés aux voies et ouvrages publics. Il en résulte que l’autorité est tenue de refuser toute demande de permis dont l’objet n’est pas conforme à la destination de l’emplacement réservé, tant qu’aucune modification du PLU n’a changé cette destination.
Exception : projet mixte incluant l’opération réservée + autre compatible
Un permis peut être légalement délivré s’il porte à la fois sur l’opération en vue de laquelle l’emplacement a été réservé (ex. la place publique) et sur un autre projet compatible (ex. réseaux, stationnements, espaces verts). Autrement dit, la compatibilité seule d’un autre ouvrage (ici, un bassin pluvial) ne suffit pas si le permis ne réalise pas l’opération réservée.
Opposabilité de l’emplacement réservé : identification dans le règlement (⚠️ à vérifier au cas par cas)
Dans cette affaire, une substitution de motifs était sollicitée (soutenant que l’emplacement, non identifié dans le règlement, ne serait pas opposable). Le Conseil d’État la rejette car elle nécessitait une appréciation de faits (non possible en cassation). Conséquence : l’opposabilité d’un emplacement réservé suppose une vérification concrète de son identification et de sa localisation dans les pièces du PLU (⚠️ À vérifier).
Référence : Conseil d’État, pourvoi contre TA Lyon, jugement du 5 juillet 2024. Dates de pourvoi : 6 sept. 2024, 9 déc. 2024 et 2 mai 2025. Numéro et date de l’arrêt du CE : ⚠️ À vérifier.
Portée et conséquences pratiques
Le juge de cassation annule le jugement du TA pour erreur de droit : le tribunal a retenu la « compatibilité » du bassin pluvial avec la place publique sans rechercher si le permis portait bien sur la réalisation de la place publique elle-même. La portée est claire : 1) un simple aménagement « compatible » dans un emplacement réservé ne suffit pas ; 2) l’autorité doit vérifier si le permis réalise l’opération réservée ; 3) à défaut, le refus est la règle, sauf modification du PLU.
Impact pratique
Pour les particuliers / lotisseurs
- Identifiez précisément les emplacements réservés affectant votre foncier (pièces graphiques + règlement).
- Si vous êtes impacté, deux voies : réaliser l’opération réservée (dans le même permis) ou faire évoluer le PLU (procédure d’urbanisme).
- Évitez les « ouvrages compatibles » isolés (ex. bassin pluvial) sans l’opération réservée : risque élevé de refus/annulation.
- Anticipez le phasage : une autorisation « mixte » peut intégrer l’ouvrage public réservé et vos aménagements privés.
Pour les collectivités
- Sécurisez l’opposabilité : mention claire des emplacements réservés dans le règlement et les documents graphiques.
- À l’instruction : vérifiez l’objet de la demande. Si elle ne réalise pas l’opération réservée, refus (L.151-41), sauf révision/modification du PLU.
- Permis « double objet » : possible si l’opération réservée est effectivement réalisée + aménagements annexes compatibles.
- Évitez les motifs approximatifs : une motivation fondée sur la seule « compatibilité » est insuffisante.
Checklist express
- Le terrain est-il couvert par un emplacement réservé clairement identifié (règlement + plans) ?
- Le permis porte-t-il aussi sur l’opération réservée (voie, place, ouvrage public) ?
- Les autres éléments du projet sont-ils compatibles avec la destination de l’emplacement réservé ?
- À défaut, une évolution du PLU est-elle envisageable à court terme ?
- Dossier de preuve : pièces du PLU, notice, plans, insertion des ouvrages réservés, phasage, engagements.
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