Le Conseil d’État rappelle que le voisin immédiat d’un projet de construction bénéficie d’une simple présomption d’intérêt à agir, et clarifie l’existence d’une procédure judiciaire liée à la détermination d’une servitude de passage qui n’a aucun rapport avec les caractéristiques du projet de construction, qu’il s’agisse de sa nature, de son importance ou de sa localisation.
Dans cette affaire, le Maire de Nîmes avait délivré, par arrêté en date du 21 juin 2018, un permis de construire à la SARL Société de Développement Rural pour une maison individuelle et un garage. Suite à une demande de M. et Mme A., la Cour administrative d’appel de Marseille, par un arrêt du 29 septembre 2022, a annulé le jugement du Tribunal administratif de Nîmes rendu le 3 décembre 2019, qui rejetait leur recours contre cet arrêté et le permis de construire.
La Cour administrative d’appel avait retenu l’intérêt à agir de M. et Mme A., en se basant sur un différend concernant une servitude de passage en faveur du pétitionnaire, tout en jugeant que le projet de construction affecterait la jouissance de leur propriété, notamment en altérant leur vue et leur tranquillité.
Saisi en cassation, le Conseil d’État a d’abord réitéré les dispositions de l’article L. 600-1-2 du Code de l’Urbanisme : un tiers (hors autorités publiques ou associations) n’a intérêt à agir contre une autorisation d’urbanisme que si le projet autorisé impacte directement les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance de son bien.
En rappelant sa jurisprudence, le Conseil d’État a souligné que les requérants doivent démontrer, avec des éléments concrets et précis, que le projet porte atteinte à ces conditions. Pour le voisin immédiat, une présomption d’intérêt à agir est reconnue dès lors que des éléments relatifs à la nature, à l’ampleur ou à la localisation du projet sont évoqués (voir CE 13 avril 2016, n° 389798). Toutefois, cette présomption ne dispense pas d’apporter des preuves quant à ces éléments dans leurs arguments. La simple proximité du projet ne suffit pas.
Enfin, le Conseil d’État a précisé que le différend judiciaire concernant une servitude de passage n’a aucun lien direct avec les critères du projet de construction (nature, importance, localisation). En conséquence, il a annulé l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Marseille et rejeté la requête de M. et Mme A. pour absence d’intérêt à agir contre le permis de construire.
Conseil d’État, 5ème chambre, 19/01/2024, 469266, Inédit au recueil Lebon
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